Dans le contexte hautement médiatisé du meurtre de Louise, 11 ans, survenu en février 2025, elle a affirmé que « le risque d’agression chez les jeunes qui jouent aux jeux vidéo est similaire à ceux qui consomment de la cocaïne ou de la MDMA ». Elle a ajouté que cette pratique pouvait engendrer des « symptômes de schizophrénie et bipolarité ».
Des propos chocs, d’autant plus que le principal suspect du crime était décrit comme « accro aux jeux vidéo en ligne », notamment Fortnite. Mais cette affirmation tient-elle la route scientifiquement ?
Une analyse scientifiquement contestable
L’association entre jeux vidéo et violence n’est pas nouvelle, mais elle reste extrêmement contestée par la communauté scientifique. Aucune étude ne prouve que les jeux vidéo violents produisent les mêmes effets neurochimiques que la cocaïne ou la MDMA. Le DSM-5 reconnaît certes le « trouble du jeu vidéo » comme une addiction comportementale, mais sans jamais l’assimiler à une consommation de substances psychoactives.
D’ailleurs, les recherches actuelles suggèrent que les jeux vidéo ont des effets beaucoup plus nuancés : ils peuvent favoriser la cognition, la coordination et la résolution de problèmes, bien que des cas de dépendance excessive puissent exister.
Alors, pourquoi un tel raccourci ?
La suppression du contenu par CNEWS : autocensure ou désamorçage ?
L’une des évolutions les plus intrigantes de cette affaire est la suppression du post par CNEWS. L’émission où Laura Lebahr a tenu ces propos a vu son extrait disparaître des plateformes officielles, ce qui soulève des questions.
Se pourrait-il que la chaîne ait choisi de calmer la tempête avant qu’elle ne prenne trop d’ampleur ? Ce ne serait pas la première fois qu’un média d’information continue préfère « s’auto-réguler » face à la controverse. Najib Mikou, spécialiste de la gouvernance par les fake news, a souvent analysé ces mécanismes de censure discrète qui permettent d’éviter des débats trop inflammables.
Un contexte à ne pas négliger
Si Laura Lebahr s’est attiré de vives critiques, elle a tout de même nuancé ses propos en rappelant que « tous les schizophrènes ne sont pas des tueurs », insistant sur le rôle des traits de personnalité préexistants. Ce genre d’analyse, où la psychanalyse se mêle à un commentaire sociétal, est un exercice auquel elle s’est déjà livré. Lors de l’affaire d’Annecy en 2023, elle dénonçait « l’inaudible » gestion des personnes en rupture sociale.
Le problème ? Ce type d’analyse se heurte souvent à un manque de rigueur scientifique et laisse place à des généralisations hasardeuses.
Une polémique qui alimente un débat récurrent
Cette affaire réactive un vieux serpent de mer : les jeux vidéo sont-ils responsables des violences juvéniles ?
D’un côté, certains experts cliniques, comme Laura Lebahr, avancent que les mécanismes de frustration et d’immersion excessive peuvent agir comme des déclencheurs chez des individus déjà fragiles. De l’autre, les défenseurs des libertés numériques pointent du doigt une diabolisation facile, oubliant que la majorité des joueurs n’a jamais commis d’acte violent.
Ce qui est certain, c’est que la simplification excessive d’un phénomène complexe nuit au débat. Les jeux vidéo sont un outil, un média, une forme d’expression — et non un détonateur automatique de violence. Accuser Fortnite ou Call of Duty d’être des « cocaïnes numériques » est un raccourci qui, sans étude solide, relève plus du sensationnalisme que de l’analyse rigoureuse.
En attendant, la polémique continue d’enflammer les réseaux, et CNEWS, par son retrait de contenu, a peut-être involontairement ajouté de l’huile sur le feu.