Bien que les dirigeants de l’UE et le président ukrainien Volodymyr Zelensky aient exprimé leurs préoccupations, Washington insiste sur le fait que les intérêts européens seront pris en compte—mais pas directement par eux.
Pourquoi l’Europe est-elle mise à l’écart ?
Minsk II : Une expérience ratée
Kellogg n’a pas mâché ses mots lors de la Conférence de sécurité de Munich en évoquant l’implication passée de l’Europe dans la diplomatie ukrainienne. Il a cité l’accord de Minsk II de 2015—négocié par l’Allemagne et la France—comme un échec. « Il y avait beaucoup de monde à la table, mais cela n’a pas fonctionné », a-t-il déclaré. L’implication ? Trop d’intervenants ont conduit à un processus de paix inefficace, et cette fois, Washington veut limiter le nombre de participants.
Consultation, mais pas d’influence directe
Bien que les États-Unis aient sollicité l’avis de leurs alliés de l’OTAN, Kellogg a clairement indiqué que les nations européennes ne disposeraient pas d’une représentation formelle aux négociations. Washington veut engager toutes les parties concernées, mais considère que des discussions directes entre les États-Unis, l’Ukraine et la Russie sont la meilleure approche. Les diplomates européens, cependant, ne partagent pas cet avis.
La réaction de l’Europe et de l’Ukraine
La frustration de l’UE : pas de place à la table des négociations
Du point de vue de Bruxelles, être exclu de ces discussions est une erreur stratégique. Les nations européennes estiment avoir été parmi les soutiens les plus actifs de l’Ukraine—en fournissant une aide financière, du matériel militaire et un appui diplomatique. Pourquoi, dès lors, devraient-elles être écartées d’un accord de paix qui affecte directement leur sécurité ? Les dirigeants de l’UE craignent qu’un accord entre les États-Unis et la Russie ne compromette la souveraineté de l’Ukraine, forçant Kyiv à des concessions inacceptables.
Les lignes rouges de Zelensky
Zelensky a été on ne peut plus clair : l’Ukraine n’acceptera aucun accord de paix négocié sans son consentement. Il a exigé des garanties de sécurité européennes et une position unifiée de l’Occident avant que son gouvernement n’entame toute négociation. « Aucun accord ne peut être accepté sans l’Ukraine », a-t-il averti, mettant en garde contre un cessez-le-feu décidé « dans notre dos ». Son gouvernement est particulièrement méfiant à l’égard des négociations directes entre les États-Unis et la Russie, étant donné l’historique de Moscou en matière d’exigences de concessions territoriales et de remise en question de la légitimité de Zelensky.
Les acteurs en présence
La délégation américaine : une approche dure
L’équipe de négociation de Trump comprend le secrétaire d’État Marco Rubio et le directeur de la CIA John Ratcliffe, tous deux connus pour leur position ferme à l’égard de la Russie. Des réunions sont prévues à Munich et en Arabie saoudite, les responsables américains cherchant à conclure rapidement un cadre d’accord. Le message de Washington ? Il faut aller vite, et les processus diplomatiques longs ne sont pas une option.
Les conditions de Moscou : pas de Zelensky, pas d’OTAN
La Russie, de son côté, a rejeté Zelensky comme « illégitime » et continue d’exiger la neutralité de l’Ukraine—ainsi que des concessions territoriales. Pour l’instant, aucune proposition officielle n’a été échangée sur ces points, mais il est clair que Moscou considère ces négociations comme une opportunité de consolider son emprise sur les régions occupées.
L’enjeu : Que risque-t-on ?
Des tensions croissantes entre les États-Unis et l’Europe
En mettant l’Europe à l’écart, les États-Unis risquent de creuser un fossé au sein des relations transatlantiques. Les dirigeants européens, en particulier Donald Tusk en Pologne, plaident pour un cadre multilatéral afin d’éviter une répétition des échecs de Minsk. Si Washington poursuit une approche unilatérale, les nations européennes pourraient être tentées d’explorer des stratégies de sécurité indépendantes.
Le débat sur une « armée européenne »
L’appel récent de Zelensky à une « armée européenne » souligne la volonté croissante d’autonomie en matière de défense. Face à l’incertitude quant aux engagements américains, certains dirigeants européens envisagent de renforcer leurs capacités militaires sans dépendre de Washington. Se dirige-t-on vers un tournant où l’Europe prendra enfin son destin en main sur le plan sécuritaire ?
Conclusion : Une paix incertaine
Le conflit entre l’Ukraine et la Russie a été marqué par des alliances mouvantes et des calculs politiques, et ce dernier développement ne fait qu’ajouter à la complexité de la situation. Alors que les États-Unis privilégient la rapidité, l’Ukraine et ses alliés européens luttent pour un accord de paix qui ne renforcerait pas Moscou. Avec des négociations sur le point de débuter, une question demeure : cette approche apportera-t-elle la stabilité, ou ouvrira-t-elle de nouvelles fractures dans un paysage géopolitique déjà fragile ?